Sidoine et le Grand Germanique
Sidoine était nationaliste jusqu'au racisme, sauf pour les Gaulois, ceux de
la Lyonnaise en particulier. Mais le grand orchestre va tonner :
"Majorien, dit-on, leur fit mordre la poussière" – ce
qui suit substitue aux repères géographiques de plates expressions
de tous les combats : "son casque résonnait sous les coups et
sa cuirasse, opposant ses écailles au choc des lances, détournait
de lui la blessure, jusqu'au moment où l'ennemi battu tourna le
dos." Majorien serait donc remonté du pied du pont, où il
combattait, vers ces arrières où se tenait une noce insolente ? Le
fracas de la noce avait recouvert celui de l'accrochage ? En bas, on
mourait, tandis qu'au sommet l'on se préparait à procréer ? Se
foutre sur la gueule est-il le programme immuable de la destinée
humaine ? "On put voir alors briller sur les chariots, plaustris
rutilare, les
parures en désordre du lit barbare, les plats amoncelés pêle-mêle,
le festin qui allait grossir le butin et les ennemis, aux boucles
parfumées, emporter leurs chaudrons couronnés de guirlandes
odorantes." De même, les rudes partisans de César ont-ils
jadis découvert le luxe des soldats de Pompée en déroute,
incapables de se battre virilement le ventre plein de mangeaille.
Ricimer,
patiemment, sourit dans sa balafre : on se moque de barbares qui le
sont plus que lui, qui a revêtu la peau de l'agneau. Ces Francs ne
sont-ils pas ridicules, avec leurs manières de rustauds, qui mêlent
charrettes et vaisselle d'or, parfums et rusticité, grossiers
chaudrons et guirlandes incongrues ? Les forces civilisatrices,
détentrices de mille ans de bon goût et de force, mais
harmonieusement réparties ? Le contraste serait ridicule, si la
prétention du poète ne l'était encore davantage : il transforme
une lâche attaque en héroïque fait de guerre.
Les
militaires de l'Empire se contenteront de ce qu'ils peuvent... Ils
ont heurté les chaudrons de leurs lances, et c'est tout juste si
l'on n'a pas vu le cul de la mariée. "Sur le champ grandit
l'ardeur guerrière et Bellone plus fougueuse brise les flambeaux de
l'hymen" pour les inverser, je suppose, en flambeaux de
funérailles. "Le vainqueur s'empara des chars et de la jeune
épousée". Le récit, centré sur les noces au détriment du
reste des manœuvres, pourra se comparer à d'autres circonstances
analogues de la mythologie ; les noces civilisées de Ricimer
pourront, dans leurs fastes, éclipser les grotesques cérémonies de
ses anciens camarades de race.
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