Trevor, Le voyage de Felicia Machinchose



Chaque roman – bien des romans – nous donnent l'impression du déjà-lu, jusqu'à cette phrase même. Le voyage de Felicia présente la même jeune fille, irlandaise au lieu d'être africaine, qui se retrouve paumée à la recherche de l'amour perdu, qui subira bien des tribulations, comme une vulgaire Tess d'Urberville ; qui rencontrera un gros homme qui lui veut du bien, comme Herr Genardy, visqueux pédophile. Qui voyagera dans toute l'Angleterre, peut-être le Pays de Galles. Dont l'âme et les nichons seront secoués de vagues ou violents sentiments psychologiques, psychologiques, psychologiques. Et nous seront émus par quelque problématique identification, compatissant aux tribulations d'une innocente en proie au mal d'amour si délicieusement mélancolique et déchirant.
Puis viendront les désillusions, le mal d'enfant, l'ingratitude dudit, et pour finir, le regard mélancolique et noyé de larmes sur un paysage noyé de brouillard, vers cette fin de la vie où chacun se demande ce qu'il est bien venu foutre ici-bas. Ne pas oublier tout un réseau familial et relationnel, avec des personnages secondaires remplis d'originalité jusqu'au ras de la plaque chauffante, et dont nous aurons bien du mal à débrouiller l'écheveau (de retour). Il y aura bien des gestes, des portes ouvertes ou fermées, des repas préparés avec les recettes, des vêtements décrits, des saisons évoquées (pluie, neige, soleil, cochez la case désirée), de l'argent gagné petitement, un coup de fortune peut-être (mais cela ne se fait plus dans les univers à la Kenloch), tout cela limité dans les étroits enclos où nos croupissons et paissons, etc.
Notre Felicia, dont le nom évoque un bon chien femelle, s'est fait suivre à la gare par le bon gros de service, puis se trimballe dans un lieu de songe dont l'auteur va nous évoquer l'aspect physique : Pas un vallonnement. Oh. C'est dommage. L'Angleterre est un pays très vallonné voyez-vous. La campagne très verte foisonne de prairies. Les ouvriers y bouffent du bœuf et crèvent à 40 ans, congestionnés ; les femmes boivent du lait qu'elles rendent par leurs mamelles. La destination de Felicia doit inspirer le plus profond découragement : elle a quitté clandestinement sa famille, vous pensez bien qu'elle ne va pas atterrir dans un pays de cocagne. De grandes cheminées nues dressées contre un ciel gris et qui crachent des nuages brûlants (a-t-il écrit burning clouds, ou cela se dit-il autrement) – rien d'original : on nous la fait « Zola », par quelques traits au fusain.

Et pas question de prairies

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