Fêtes Religieuses, aux éditions du Bord de l'Eau

COMMENT ET POURQUOI Y A-T-IL DES FETES RELIGIEUSES ?
C'est donc non seulement un élément de cohésion, mais une occasion aussi de défoulement
communautaire, de rupture - de folie : chez les chrétiens, la Fête des Fous, le 1er janvier (jour de la Circoncision) donnait lieu à toutes sortes de débordements, voire de profanations. En dépit des interdictions (la dernière date du 19 janvier 1552), la pratique s'en poursuivit jusqu'en 1645 à Antibes. La fête en soi s'interprète donc comme un élément de désordre, dans un monde que domine l'ordre. Et malgré les mises en garde, les fêtes religieuses risquent toujours de dégénérer en beuveries ou en “foire à tout” (le site Noël” sur internet vous propose pendant des pages toutes les connections commerciales et bouffatoires imaginables avant qu'il soit question le moins du monde d'une quelconque référence religieuse).
Aussi les fêtes religieuses proprement dites, dans les trois religions monothéistes qui nous intéressent ici, tendant à renforcer la cohésion et l'ordre, se sont bien souvent efforcées de se substituer, tant bien que mal, à des célébrations plus ou moins orgiaques, en leur superposant leurs prétextes cultuels et liturgiques, récupérant et confisquant ainsi l'inévitable reliquat de désordres au profit de ses seuls prêtres ou autres illuminés – dont elles se méfiaient par ailleurs.

QUELLE EST LEUR FONCTION ?

Une fête religieuse en effet tient à se distinguer d'une fête profane en ce qu'elle fait appel non à quelque sentiment d'appartenance à une communauté professionnelle (“Fête des vignerons”) ou territoriale (fêtes nationales), c'est-à-dire à quelque chose de tangible, mais à une solidarité transcendantale, céleste (sous cet aspect, certaines célébrations patriotiques, en certaines circonstances exaltantes comme la récupération d'une indépendance ou la libération d'un territoire occupé, peuvent s'apparenter à une fête religieuse, dans la mesure où le concept de Nation se trouve exalté au niveau même d'une entité divine ; là encore, la frontière est aisément franchie entre l'émotion et la ripaille : le 14 juillet 1919 fut essentiellement une gigantesque et obscène célébration de la Dive Bouteille bien plus que de la Sainte Patrie...

PROFANE OU SACRE
C'est ainsi que nous pourrions différencier le profane du sacré, distinguant plus ou moins malaisément ce qui relève de la tradition profane, des concession profanes (divertissements proprement dits, échange de cadeaux, traditions pittoresques) de ce qui a trait à la célébration proprement dite, pouvant se manifester par des cérémonies austèrement recueillies : mouvement d'une extrême gravité : mouvement universel de bascule, entre le “plateau” du festin profane, récupéré par les forces apaisantes de la religion, et celui de la célébration solennelle tout empreinte d'élévation – l'un sans l'autre, au vu de la dualité humaine, semblant difficilement concevable. Opposer d'autre part de façon plus sociologique les festivités ou débordements populaires aux recueillements de l'élite en évoquant une “religion à deux vitesses”, une pour le peuple, une pour les clercs, nous rappellera, de façon moins sectaire, moins ésotérique, deux dimensions présentes en chacun de nous, et ce, quelle que soit notre appartenance sociale...
Un autre distinguo s'effectuera également : les cérémonies et fêtes privées, mariages sanctionnés et sanctifiés par la religion, baptêmes, circoncisions et communions, interviennent bien entendu de façon tout à fait particulière (voire inattendue pour des funérailles, conçues dans certaines communautés comme de véritables fêtes) ; mais il semble difficile et peu souhaitable, pour ne pas dire impossible, de célébrer l'une de ces fêtes en même temps qu'une réjouissance officielle. C'est ainsi par exemple que les noces ne peuvent se célébrer, pour les juifs, entre la Pâque et Souccoth (fête des Cabanes), “par suite de l'interdiction de confondre deux occasions différentes de joie, celle de la fête et celle du mariage”. En France catholique, la coutume est de ne pas célébrer de cérémonies familiales un jour de fête ni même un simple dimanche ; il s'agit là du maillage, de la scansion d'une vie individuelle, irrégulièrement superposés à ceux de la vie communautaire.

RESPECT DE L'ORDRE CHRONOLOGIQUE
Nous traiterons donc des fêtes religieuses publiques, par ordre chronologique d'apparition des religions, même si d'aucuns affirment qu'Adam fut déjà un parfait musulman ou un parfait juif (n'est-il pas de bonne guerre que chacun s'estime le premier sur la place ? certains chrétiens ne se figurent-ils pas que tous les dogmes remontent à l'Evangile selon Jésus-Christ, ainsi que le moindre rite de tous les sacrements, alors même qu'on leur démontrerait cent fois que tout cela ne s'est élaboré qu'au fil des conciles et des décisions papales, voire impériales ? )
Chaque fête recevra donc une définition, la plus succincte possible ; puis nous établirons sa date, ses références historiques ; nous évoquerons les rites et liturgies qui les accompagnent ; les coutumes et réjouissances, publiques et privées, dont elles sont soulignées ; enfin leur signification mystique, dans la mesure où les sources religieuses des trois grandes confessions monothéistes occidentales, juive, chrétienne et musulmane, nous en aurons instruits.

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